Témoignage de Julien Fonteneau, volontaire VSI au Pérou

Où se passe ta mission de volontariat social ?
L’association dans laquelle j’effectue ma mission, Asociación Casa Javier, a pour but d’accueillir et d’offrir une opportunité de vie accompagnée d’éducateurs à des jeunes en situation d’abandon. L’association fournit à ces jeunes le logement, la nourriture, l’accès à la santé et à l’éducation, et ce jusqu’à l’université, afin de leur permettre de trouver leur place dans la société.

Cette association a construit 3 casas (foyers) avec des directeurs et des éducateurs. Les jeunes y vivent à plein temps, hormis quelques visites dans leurs familles. L’objectif est de créer un climat familial avec des petits groupes. Les jeunes sont accompagnés dans leurs études et dans leur autonomie de la vie quotidienne. Des activités institutionnelles et religieuses sont organisées car l’association est basée sur des valeurs jésuites.

Elle s’occupe en ce moment de 19 jeunes : 5 garçons majeurs (18-25 ans), 7 garçons mineurs (12-17 ans) et 7 filles mineures (12-17 ans).
Ce sont des jeunes avec des parcours de vie compliqués, empreints de violences, d’abus, de carences affectives. Les jeunes ont été sélectionnés à travers un processus (différentes rencontres, plusieurs jours dans le foyer en observation) avec comme critère une appétence pour les études et des capacités à vivre en collectivité.

Peux-tu nous parler de ta mission en tant que telle ?
En tant que travailleur social, mes missions sont les suivantes :

  • Évaluer la situation familiale de chaque jeune et les liens existants;
  • Faire un programme individuel pour renforcer leurs liens familiaux;
  • Gérer le suivi des programmes;
  • Étudier tous les documents de l’association en lien avec la situation familiale des jeunes;
  • Réaliser des visites à domicile de toutes les familles des jeunes mineurs, seul ou avec ma référente;
  • Pour chaque jeune mineur, rédiger une fiche sociale, un document appelé informe socio familiar, qui décrit la situation de la famille, les recommandations à propos du type de lien entre le jeune et sa famille, un calendrier des visites et un compromiso (engagement) que chaque famille doit signer s´engageant à respecter le calendrier;
  • Rédiger un document indiquant les règles à propos des liens familiaux que doivent respecter les éducateurs afin de gérer les visites familiales, et savoir qui a la charge de quoi entre les directeurs, éducateurs et travailleurs sociaux.

Comment vis-tu cette expérience ?
C’est une véritable aventure, car je vis dans un autre pays, qui a sa propre culture, dans lequel je n’ai aucun repère et où je suis éloigné de mes proches. La langue a été un obstacle pour moi pendant les 6 premiers mois, pour mener ma mission en autonomie. J’ai beaucoup appris sur moi-même, c’est-à-dire que j’ai découvert que j’étais capable d’être moins rigide sur ma manière de percevoir les choses, et des aspects de ma personnalité se sont confirmés, tel que ma sociabilité.
Sur le plan professionnel, j’ai souvent été frustré car la culture et la vision de l’éducation me paraissent assez sommaire. En revanche, cela m’a permis de me rassurer en me disant que mes études et mes expériences professionnelles en tant qu’éducateur spécialisé m’ont permis d’acquérir des savoir-faire, qui me permettent aujourd’hui d’aider l’association à accompagner les jeunes dans leur éducation.

Comment s’est passé l’accompagnement de Sems International sur cette mission ?
J’ai rencontré à plusieurs reprises Denis, le président de l’association, ce qui m’a permis de prendre du recul et d’échanger sur nos expériences respectives. Denis est venu dans mon association pour faire un bilan de mi-mission afin de s’assurer du bon déroulement de mon volontariat. À deux reprises, j’ai eu des temps d’analyse de la pratique par internet afin d’échanger sur notre vécu avec les autres volontaires, et Clémence, la psychologue.

Une anecdote que tu aimerais nous partager sur ta mission ?
Les jeunes regardent souvent une série sur Netflix avec des morts-vivants, dans laquelle il y a beaucoup de violence et de sang. Je suis intervenu pour leur dire que cela ne me paraissait pas adapté. J’en ai parlé à l’éducateur, qui n’a pas compris ma position et qui n’était pas ouvert à l’échange, car pour lui il n’y avait aucun problème. Autrement dit, ce qui peut nous paraître logique et évident ne l’est pas forcément dans une autre culture. Il faut donc sans cesse regarder les situations avec du recul, car notre prisme de français nous montre la réalité sous un certain angle, subjectif.

Un moment en particulier, un échange, une journée qui t’a marquée ?
Avec le recul, je dirais la journée où je suis arrivé, ma première rencontre avec les membres de l’association et les jeunes. J’étais très enthousiaste, avec une vision idéalisée du volontariat et une forte envie de découvrir une autre culture. Je parlais très peu l’espagnol, mais le plaisir était là car j’étais enfin au Pérou, après plusieurs semaines de préparation. Mes premières impressions se sont confirmées : j’ai rencontré des gens attentionnés et accueillants, avec l’envie de partager.